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Hollywood en guerre contre la révolution numérique

Un extrait du nouvel ouvrage de MM2 Editions: DARKNET de JD Lasica (sortie le 10 mai 2006).

Et maintenant : Hollywood contre les combattants de la liberté numérique !

Les juristes, hommes d'affaires, et ingénieurs des trois industries s’assirent autour de la table d'une petite salle de réunion de l'hôtel Hilton de l'aéroport de Burbank. Ce forum industriel, qui serait bientôt connu comme l'association du contrôle des copies de DVD (CCA), fut créé par une poignée de personnes qui parlaient pour les studios d'Hollywood, les industries de la haute technologie, et l'industrie des consommables électroniques.
Quelques mois auparavant, à l'aube de l'ère du DVD en 1996, ces trois groupes s'étaient disputés, avant de finalement tomber d'accord pour autoriser les films hollywoodiens à être lisibles sur des ordinateurs personnels en plus des lecteurs de DVD. Maintenant, tout ce que les studios désiraient était de mettre en place le nouveau système de « codage par zone » autour du globe. Tout comme les grandes puissances alliées avaient découpé l'Europe et le Moyen-Orient comme des prises de guerre, les magnats d'Hollywood avaient découpé le monde en six grandes zones. Pour permettre de préserver le système qui contrôlait les dates de sortie des films dans les marchés étrangers, les studios considèrent nécessaire de configurer les lecteurs de DVD de façon à ce qu'un DVD vendu aux États-Unis (zone 1) ne puisse être lu en Angleterre (zone 2), au Brésil (zone 4) ou en Inde (zone 5).
Mais, l'industrie d'Hollywood était toujours insatisfaite, craignant que le codage par zones puisse être contourné. Un petit nombre de cinéphiles à Paris, Londres, et Rome avait commencé à acheter ces nouveaux lecteurs de DVD dernier cri et à changer le réglage vers la zone 1. De cette façon, ils pouvaient acheter et visionner un DVD américain, bien avant que la version étrangère du même DVD n’arrive sur leur marché. Les ordinateurs de bureau ou portables étaient un autre problème. Des cinéphiles pouvaient récupérer un DVD hollywoodien, lors d'un voyage à New York, et le regarder – parfois même avant que le film n’arrive dans les salles dans leur propre pays – simplement en changeant le codage de région. Que faire ? Comment empêcher ces gens de contourner la loi ?
Le délégué des bureaux d'Universal Studios se pencha sur la question. Il émit une idée simple : placer une puce reliée à un satellite GPS dans chaque lecteur DVD et ordinateur vendu avec un lecteur de DVD. Hollywood serait alors en mesure de traquer la localisation de chaque personne qui utilisait un lecteur de DVD et de contrôler son adhérence aux lois depuis le ciel. (1)
James M. Burger, un juriste de Washington qui représentait les industries technologiques, raconte la réaction des employés des industries informatiques électroniques à l'idée d'implanter un système à la James Bond dans les machines de millions d'utilisateurs.
« Nous nous regardâmes les uns les autres, légèrement ébahis, me dit-il.
-À cause des problèmes de respect de la vie privée ? lui demandais-je.
-Oh, non ! À cause des coûts supplémentaires. Est-ce que vous avez une idée de ce que coûtaient les puces GPS à cette époque ? » (2)
Finalement, cette proposition fut rejetée et un système moins intrusif, et surtout moins cher, fut adopté : un utilisateur ne pouvait changer les codes de zone sur son ordinateur portable qu'un certain nombre de fois avant que celui-ci ne se bloque sur une zone de façon permanente. (Les membres de l'association du contrôle des copies de DVD ricanent maintenant en repensant à cette première idée, expliquant que beaucoup d'idées farfelues furent émises durant ces réunions.) Depuis longtemps, Hollywood a une tendance au théâtral et à l'impérial. Burger parle d'une audition publique qui s'était tenu à Washington et qui illustre parfaitement l'écart culturel entre Hollywood et la haute technologie.
« Un dirigeant du studio se leva et dit : "les gens payent pour avoir le privilège de voir nos films." Pouvez-vous imaginer un dirigeant informatique dire : "les gens payent pour avoir le privilège d'utiliser nos machines.?" Il se serait fait massacrer. Il y a parfois une attitude très impériale à Hollywood. »
Le plus frappant de ces écarts culturels est sûrement les différentes attitudes des industries vis-à-vis du changement. « Nous adorons les technologies perturbatrices », explique le vice-président d'Intel, Donald S Whiteside. « La seule constante dans Silicon Valley c'est le changement, ajoute Joe Kraus, cofondateur du moteur de recherche Excite. Hollywood a toujours eu une tendance à voir le changement comme une chose indésirable, et donc ils font tout ce qu'ils peuvent pour l'éviter. »
Ces dernières années, la presse a réduit le conflit entre Hollywood et Silicon Valley à un conflit à propos du piratage sur Internet. Mais le piratage n'est pas la question principale. Les studios sont majoritairement intéressés par la protection de leur étincelant nouvel empire du DVD. Deux technologies protègent ce modèle hollywoodien : l'encryptage (ou le contrôle des copies), qui empêche le copiage; et le codage par zone, qui permet un processus ordonné de sortie mondiale des films. Tandis que le contrôle des copies est valable pour lutter contre le piratage, l'encodage par zone ne fait rien pour empêcher les gens de redistribuer les films sur Internet. Au lieu de ça, le codage par zones permet à Hollywood de contrôler la distribution des films, du cinéma au domicile, au pay-per-view, à la vidéo sur demande, à la télévision par câble, ou au réseau télévisuel de chaque pays. (3) Beaucoup d'Européens n'apprécient pas d’avoir à attendre de nombreux mois après qu'un film hollywoodien soit sorti en DVD aux États-Unis avant de le voir chez eux. (4) Un programmeur français âgé d'une trentaine d'années habitant en Irlande, et qui se fait connaître par le nom technique de >NIL, dirige le groupe Pioneer Region Free DVD, qui permet d'aider ceux qui veulent contourner les encodages par zone sur leurs lecteurs de DVD (vous trouverez des centaines de sites semblables à celui-ci sur Google et des centaines de lecteurs de DVD dézonés à vendre sur eBay.) « Etant français, cela ne me gênerait pas de voir une révolution faire s'écrouler tout ce système monolithique », m'explique-t-il.
La controverse sur le piratage Internet n'est qu'une partie d'un problème beaucoup plus grand. C'est une bataille à propos de comment nous pouvons utiliser, posséder, et partager les médias numériques. Tandis que de plus en plus de personnes créent des médias personnels et commencent à participer à notre culture, nous pouvons voir les grandes sociétés tenter de contrôler toutes les utilisations et réutilisations de leurs travaux, même si c'est au prix des droits traditionnels des citoyens.
Dans ce conflit, la presse a trop souvent omis de poser les vraies questions. Est-ce que cette nouvelle vague de restrictions imposées sur des Américains respectueux des lois (décrits dans des chapitres ultérieurs) a un effet quelconque sur des pirates déterminés ? Est-ce que cela en vaut vraiment la peine ? Les adaptations maisons seront-elles autorisées, ou est-ce que des verrous seront placés sur tous les matériels numériques pour empêcher le piratage, nous empêchant ainsi d'adapter les médias pour notre usage personnel ?
Cette longue bataille sur l'équilibre entre la liberté et le blocage total, dans cet âge digital, ne montre aucun signe d'apaisement. Tandis qu'Hollywood et la haute technologie se chamaillent à ce sujet, l'industrie de l'électronique, et ses 100 milliards de dollars de bénéfices, reste tranquillement sur la touche. Malgré quelques renégats, tels que Philips Electronics (dont le siège social se situe aux Pays-Bas), Archos (en France), Pinnacle (en Allemagne), ou des start-up telles que Diamond Multimédia ou SonicBlue, les fabricants d'électronique ont la réputation d'être soumis aux grandes industries du divertissement. Et pour une bonne raison : personne n'achète un lecteur de DVD ou une télévision grand écran à moins qu'il n’y ait un super programme.
Fait contrastant, les géants de l'industrie technologique – qui représentent à peu près 10 fois plus qu'Hollywood – sont moins susceptibles d'écouter les supplications ou les cajoleries de l'industrie du cinéma. Le résultat principal est que la haute technologie a été le meilleur ami du public dans les forums privés, où les innovations du numérique à domicile sont révélées. « Nous ne donnons pas tout clé en main à Hollywood. Nous négocions afin de préserver un usage juste et les droits des consommateurs », dit Stéphen Balogh, un dirigeant d'Intel qui représentait l'industrie informatique lors de la réunion susmentionnée. (5)
Mais la haute technologie est de moins en moins du côté du public. Trois raisons expliquent ceci. La première est qu'une consolidation médiatique grandissante a brouillé les pistes. Par exemple, lorsque Sony n'était encore qu'une société d'électronique, son seul souci était de créer des outils cool et design. Maintenant que la société possède un studio de cinéma ainsi qu'un label musical, Sony oriente plus ses priorités vers la protection de son matériel sous droit d'auteur plutôt que de fournir à ses clients une « expérience de la meilleure qualité possible. » La seconde est que le Congrès a fait passer le message qu'il considérerait l'imposition gouvernementale si le secteur technique ne prenait pas en compte les inquiétudes des sociétés médiatiques sur le piratage numérique. Stimulés par une telle menace et par peur des procès, les créateurs d'ordinateur se sont réunis derrière une association créée pour bloquer le matériel et empêcher les gens de copier ou de manipuler les médias de divertissements distribués par les grandes sociétés. La troisième raison est que les grandes sociétés informatiques, voyant leur croissance ralentir, ont commencé à envahir le domaine du divertissement familial, devenant dépendantes des grandes sociétés de divertissement. En 2003, Hewlett Packard a lancé sur le marché 158 produits de consommation, de l'appareil photo numérique à un gadget qui convertit les vieilles cassettes VHS en DVD. Gateway a plutôt parié sur l'électronique en sortant des téléviseurs plasma, des lecteurs de DVD, des caméscopes numériques, et du matériel pour le numérique à la maison. Dell fait maintenant des télévisions numériques grand écran. Microsoft (6) a lancé une télévision numérique, contrôlée par ordinateur, pour le salon. Apple vend le lecteur musical numérique le plus célèbre au monde; l'iPod, et les programmes qui l'accompagnent (iTunes, iMovies, iPhotos). Ces innovations ont moins à voir avec l'informatique qu'avec la création et la gestion de divertissement. Même le géant du téléphone cellulaire Nokia a franchi ses limites en créant des téléphones mobiles qui envoient des e-mails, prennent des photos, et possèdent des jeux intégrés. Il y a un curieux mot pour ça : la convergence.
Si vous appréciez de faire subir à vos enfants les histoires sur le bon vieux temps, un jour vous pourrez leur parler de cette étrange époque où les médias existaient dans des conteneurs séparés. Les programmes télés ne pouvaient être regardés que d'une télévision, la musique sortait d'une stéréo ou d'une radio, les grands films hollywoodiens n'étaient visibles à leur sortie que sur un écran de cinéma. Les films maison étaient regardés (s'ils pouvaient l'être) sur un drap grâce à un projecteur. Les ordinateurs servaient à la production. Les photos appartenaient à des albums ou à des boîtes à chaussures. Tout cela est en plein changement, grâce à la convergence, ce mot apparu dans les années 1990 et qui devient finalement réalité. Tandis que les médias se transforment en série de 1 et de 0 –programmes TV enregistrés sur des boîtes numériques, dix milles chansons pouvant tenir dans la poche d'une chemise – tout ce matériel nécessaire pour distraire ressemble de plus en plus à des ordinateurs personnels, avec un disque dur, des puces et des connexions pour le travail sur Internet. Qu’augure cette transformation ? D'après la haute technologie, la convergence signifie laisser tous les gadgets distractifs, présents à notre domicile, communiquer entre eux, pourquoi pas commandés par une unique boîte noire que les sociétés de technologie placeraient dans votre salon. Si vous écoutez les groupes médiatiques, vous pourriez penser que la convergence se réfère aux corporations travaillant en «synergie» et fournissant des «contenus» à travers de nombreuses dimensions. Les clients, s'ils sont pris en compte, sont considérés comme « des oisillons à la bouche grande ouverte, heureux de se saisir de tout ce que les grandes sociétés veulent bien leurs donner », d'après un participant au sommet du média digital de l'année dernière à New York (7).
Mais la convergence, c'est beaucoup plus que des boîtes noires, de nouveaux jouets, ou le mariage de la technologie et du showbiz. La véritable convergence est un détonateur dans l'architecture à sens unique descendant des médias. Lorsque les médias se réunissent ensembles de façons innovantes, les consommateurs deviennent des producteurs qui veulent une plus grande capacité à participer à ces médias, pour les utiliser et créer leurs propres expériences. Les nouvelles technologies changent l'équilibre du pouvoir entre les sociétés de médias et leurs clients, de telle façon que, par exemple, les ordinateurs ne sont plus seulement des instruments permettant de rejouer de la musique et des films mais deviennent des laboratoires de photographies, des mini studios d'animation, et des studios d'enregistrements musicaux.
La véritable convergence se produit lorsque des gens créent leurs médias personnels ou capturent du média de masse et le personnalise. La convergence, de façon significative, implique son utilisateur. « Lorsque les médias s'entrecroisent, le public commence à archiver, à annoter, à s'approprier, et à retransmettre ce média. Chacune de ces étapes est valorisante pour le consommateur, explique M. Jenkins du MIT. Nous sommes maintenant témoins de cette guérilla de la terre brûlée entre les consommateurs et les corporations qui continuent à résister aux changements. Les corporations contrôlent toujours plus de cartes que les consommateurs. Mais elles contrôlent de moins en moins de cartes concernant la manière dont les consommateurs stockent les contenus des médias depuis l'apparition du magnétoscope, du photocopieur, de l'Internet, et des terminaux de stockage personnel (TiVo). » Les sociétés des médias et leurs partenaires techniques ne voient pas ça de la même façon.
Lors du Consumer Electronics Show de 2004 à Las Vegas, Carly Fiorina, directrice exécutive de Hewlett Packard, exprima sur scène sa vision de la révolution numérique, une ère dans laquelle chacun de nous devient créateur de ses photographies digitales, de ses films, et de sa musique (elle dut renoncer à son poste un an plus tard). « Nous sommes tous des révolutionnaires du numérique maintenant, proclama-t-elle. Dans cette nouvelle époque, nous devrons nous appuyer sur une technologie intime et intuitive, qui travaille où, quand et de la façon dont nous voulons qu'elle travaille. »
Mais elle en a surpris beaucoup dans la foule en lançant une attaque cinglante contre la piraterie digitale (8) : « Ce n'est pas parce qu'on peut voler de la musique, qu'on doit le faire. Ce n'est pas parce qu'on peut s'emparer de la propriété intellectuelle d'autrui gratuitement, qu'on doit le faire. Simplement parce que vous pouvez le faire et ne pas vous faire prendre, ne veut pas dire que c'est bien. C'est illégal, c'est mal, et en tant que société technologique il y a des choses que nous pouvons faire pour aider et que nous ferons. »Fiorina exhiba alors à bout de bras le nouvel iPod ultramince que HP allait bientôt lancer sur le marché et se lança dans un discours de séduction, destiné aux dirigeants des sociétés médiatiques de New York et Los Angeles, en annonçant que la société utiliserait toute la puissance de sa valeur boursière de 57 milliards de dollars pour appuyer le showbiz. « À partir de cette année, HP s'efforcera de construire chacun de ces produits destinés à la consommation dans le respect des droits digitaux. En fait, nous avons déjà mis en application cette décision de fournir des produits tels que notre graveur de DVD, qui protège dès maintenant les droits digitaux. Si un consommateur essaye par exemple de copier une cassette VHS protégée, le graveur de DVD possède une technologie développée par HP qui empêche la copie; à la place un message apparaîtra, disant : « le contenu original de ce matériel est sous droit d'auteur. La copie n'est pas autorisée. » Et bientôt la même technologie sera présente dans chacun de nos produits. »
Il était très clair que les «droits digitaux» qu'HP allait maintenant protéger étaient ceux mis sous les verrous des grandes sociétés médiatiques. En ce qui concerne « mettre plus de pouvoir dans les mains des révolutionnaires du digital », HP vous permettra de copier, coller, emprunter, remixer, et remettre en circulation seulement le matériel culturel non protégé par ses systèmes. Ne pas approuver vous fait risquer d'être considéré comme un « pirate ».

Sur la majorité des sujets publics de principe de cet âge numérique, l'industrie de la haute technologie s'est séparée en plusieurs factions. Certains créateurs de matériel comme Intel, par exemple, s'opposent à la loi qui fait du piratage informatique un crime fédéral, quelles que soient les circonstances. Intel a aussi rempli un dossier à remettre à la cour en faveur d'Éric Eldred (9) et a vaillamment combattu le projet de loi anti-innovation INDUCE en 2004, et il a accueilli un sommet des droits digitaux pour mettre en lumière les menaces posées à l'innovation. Whiteside, le représentant d'Intel à Washington, résume le conflit au sujet des technologies numériques de cette façon : « Donner aux consommateurs la possibilité de créer leur propre liste de chansons préférées, leur permettre de filmer leurs propres extraits vidéo, et d'en adopter et recréer le contenu – tout cela rencontre une très forte résistance de l'industrie créative parce que l'intégralité de leurs modèles d'activité repose sur la distribution d'un contenu emballé et scellé, d'une façon qui supporte leurs affaires. Ceci est le début d'une longue querelle qui durera des années. » (10)
Mais d'autres sociétés technologiques – plus particulièrement les créateurs de programmes – soutiennent les projets de verrouillage d'Hollywood. De nombreuses sociétés technologiques soutiennent les lois anti-innovation telles que le Digital Millenium Copyright Act, de même que les régulations gouvernementales et les standards industriels qui restreignent l'usage des médias électroniques au public. D'autres entreprises technologiques sont heureuses de participer à la construction de verrous numériques restrictifs pour les industries du spectacle. Le président de la News Corporation interpella ainsi la foule présente au Comdex de 2002 : « Rejoignez-nous et aidez-nous à construire nos filigranes technologiques et nos programmes de cryptage ! » (11)
Si on ne peut pas toujours compter sur la haute technologie pour défendre les intérêts d'un public qui désire de plus en plus déchirer, mixer, et brûler les symboles culturels, vers qui peut-on se tourner ? Le mouvement de la culture libre. Tandis que les lignes de fissures créées par les nouvelles technologies s'agrandissent, Hollywood et un groupe avant-gardiste d'enthousiastes du numériques s'affrontent dans un duel digne de Règlements de comptes à OK corral. Les deux camps peuvent être personnifiés par deux individus : Jack Valenti et Lawrence Lessig.
La carrière de Valenti est un véritable roman. Lieutenant dans l'armée de terre pendant la deuxième guerre mondiale, il a effectué 51 missions de combat en tant que pilote d'un bombardier d'attaque B- 25 en Italie. Il était présent dans le cortège de voiture le 22 novembre 1963 à Dallas, et « il a vu ce jour un jeune et brave président se faire assassiner. » Sur ce fameux cliché de Lyndon B. Johnson prêtant serment à bord de l’Air Force One, accompagné d'une Jacqueline Kennedy abasourdie, Valenti est à droite. LBJ avait compté sur lui pour assurer la transition. Valenti a quitté le service du gouvernement en mai 1966 pour diriger l'association cinématographique américaine (MPAA), le groupement des studios cinématographiques. Pendant les 38 ans de son occupation à ce poste, il est devenu une légende du lobbying. Lorsqu'il ralentit ses activités après avoir préparé son successeur, Dan Glickman, l'association resta la création de Jack. L'une des personnes les mieux introduites à Washington, Valenti transforma son association en une des bases de pouvoir législatif les plus puissantes de la capitale. L'industrie du spectacle fournit aux candidats du congrès à peu près 25 millions de dollars par élection, sans faire mention de tous les avantages fournis, tels que des rencontres avec les stars.(12)
Les studios sont la force qui guide et dirige la politique du MPAA. Avec l'acquisition de la MGM par Sony en 2004, la plupart des grands studios hollywoodiens sont maintenant des parts de conglomérats médiatiques qui possèdent aussi des réseaux de télévision, des stations radio, des maisons de disques, et diverses activités annexes (lorsque je me réfère à «Hollywood» dans ce livre, j'inclus bien sûr toutes ces activités, et pas uniquement l'industrie de la réalisation cinématographique. Et il faut aussi insister sur le point qu'Hollywood n'est pas un monolithe. De nombreux éléments innovants, tournés vers l'avenir dans ce nouvel Hollywood embrassent la culture numérique. L'Hollywood auquel j'ai fait référence dans le sous-titre de ce livre est le vieil Hollywood qui résiste aux changements, celui qui voit les nouvelles technologies et les nouveaux acteurs de ce jeu comme une menace à l'encontre de son système.)
Bien que tous les studios membres du MPAA puissent s'exprimer sur l'élaboration de sa politique, certains sont particulièrement volubiles sur le sujet des droits d'auteur et du piratage. « J'ai mis du temps à comprendre que le MPAA représente les points de vue des joueurs les plus extrêmes, » dit M. Balogh, d'Intel. Les plus grands studios sont généralement prévisibles sur ces sujets : avec Disney et la Twenthieth Century Fox se campant sur les positions les plus rigides, Universal, la MGM et Paramount maintenant des positions intermédiaires; et Sony et Warner Bros qui montrent le plus grand degré de flexibilité.
L'association a, en quelque sorte, achevé son grand chelem en 1997 et 1998, lorsque le Congrès a ratifié le passage de trois lois. La loi contre le vol électronique (No Electronics Theft Act) soumet les individus à des peines maximales de trois ans d'emprisonnement et de 150 000 $ d'amende pour toutes reproductions ou distributions de matériel, sous droits d'auteur, par des réseaux électroniques. Une autre loi a permis l'extension de la durée des droits d'auteur de 20 ans supplémentaires (Sonny Bono Copyright Term Extension Act). Enfin, et pour finir, une dernière loi a rendu illégale toute tentative d'altération des protections anti-copies sur le matériel numérique (Digital Millenium Copyright Act). Ce sont ces deux dernières lois, vilipendées par la plupart de la population, qui ont donné naissance au mouvement de la culture libre.
Valenti est devenu familier de beaucoup d'Américains grâce à ses apparitions sur scène aux Oscars depuis près de 30 ans. Sa plus grande réussite est sûrement le système, maintenant familier de tous les Américains, de classement du visionnage des films par tranche d'âge selon leur contenu (13), créée en 1968 et qu'il continue à diriger. Il a aussi aidé à créer dans les années 90 le système, moins connu, de calibrage des puces de télévision.
Maintenant âgé de 83 ans, ce texan aux cheveux blancs, aux sourcils touffus, et à la silhouette frêle a toujours énormément de pouvoir. Le 24 février 2003, il s'est exprimé à l'université de Duke, lançant sa campagne « d'impératif moral » directement à la face de l'opposition : les campus d'université. Présentant bien, sûr de lui est légèrement impérieux, il a appelé les étudiants à déposer les armes du piratage informatique et à reprendre les vieilles vérités : «Des mots tels que le devoir, le service, l'intégrité, la pitié, la fierté, la compassion, et le sacrifice. » Cet orateur né a évoqué « la magie migratoire des suites de zéros et de uns du numérique » qui crée « une collision des valeurs de notre pays. » (14) (Valenti écrit ses propres discours, mais sincèrement, qui donc pourrait le faire pour lui ?) Quelques mois plus tard il me dit qu'il s'est adressé à plus de 38 000 étudiants, dans huit universités différentes, cette année-ci. « Je crois sincèrement qu'il y a un désengagement de la population jeune à propos de qui possède quoi et pourquoi, clame-t-il de sa résonante et familière voix de baryton. Ils ont rationalisé en se disant qu’ils ne pouvaient pas faire de mal à une grande société cinématographique en copiant un seul film ? Mais ce dont ils ne se rendent pas compte, c'est que dix millions de personnes font la même chose et s'échangent ces fichiers. »(15)
Valenti, avec son charme sudiste et ses plaisanteries décontractées, semble apprécier ces duels avec les étudiants sur le sujet du piratage informatique. « Lorsque je leur demande, combien d'entre eux croient que ce qu’ils font est mal, moralement et légalement, la plupart d'entre eux lèvent la main. Mais ils rationalisent ce fait en disant que, oui, c'est un genre de vol, mais tout le monde le fait, et il est trop cher d'aller au cinéma. » Il a eu beaucoup plus de succès en ralliant à sa cause les dirigeants des universités. Sur l'ordre du MPAA, beaucoup d'universités ont adopté des codes de conduite qui punissent les étudiants qui téléchargent ou partagent du matériel sous droit d'auteur.
Mais le poids lourd hollywoodien et sa politique antipiratage a souffert de nombreux revers. En 1996, la première grande bataille digitale s'est déroulée lorsque Hollywood et les créateurs de consommables électroniques ont essayé de faire passer une loi à Washington qu'ils désiraient voir codifiée dans la législation fédérale. Parmi d'autres choses, la proposition aurait requis que chaque ordinateur scanne chaque dossier qu'il rencontrait - chaque mail, film, document, ou morceaux de musique - et recherche le code permettant de savoir si la copie était permise.
Rhett Dawson, président d'une association d'échanges de Washington pour l'industrie informatique, a expliqué au journal national que cette proposition « était de la folie » parce qu'elle aurait ralenti les performances de chaque ordinateur d'au moins 50 %, sans aucun bénéfice pour l'utilisateur et sans accomplir ce que voulait Hollywood.
En 1998, les grandes sociétés du divertissement du spectacle ont obtenu quasiment tout ce qu'elles désiraient du Congrès avec le passage de la loi DMCA et l'extension des droits d'auteur de 20 ans. Mais début 2002, Hollywood était de retour pour tenter d'obtenir de nouvelles législations, et a sorti la grosse artillerie pour toute une série d'auditions avec le Congrès. Le directeur de Disney, Michael Eisner, a attaqué les grandes sociétés technologiques en les accusant de promouvoir le mixage comme façon de s'approprier la propriété d'autrui. Le directeur de la Time Warner, Richard Parsons, et le président de la News Corp, Peter Chernin, ont longuement évoqué la menace posée par la piraterie numérique et ont demandé au congrès de forcer l'industrie technologique à protéger les médias du pillage. Le Congrès a refusé de légiférer immédiatement, mais fin 2003 Hollywood a persuadé la commission fédérale des communications (FCC) d'adopter un plan qui restreint pour le public les transferts et les visionnages des spectacles télévisés.
Mais même cela n'est pas suffisant. Valenti reste extrêmement déçu par la façon dont on peut copier et transférer des matériaux sous droits d'auteur par ordinateur « sans qu'aucuns circuits intégrés ne puissent empêcher ce piratage. » Cependant, il prend à coeur les efforts des « entreprises de confiance » du monde informatique tel que Microsoft et ses alliés, qui visent à modifier les ordinateurs. Bien qu'il puisse parfois sembler que les directeurs de studio désireraient un Transmooker – cet instrument qui dans le film Spy Kids permet d'arrêter toute la technologie sur la planète – Hollywood a un long passé d'assimilation des nouvelles technologies. Disney, qui désire bénéficier d'une plus grande distribution de ses films classiques pour enfants, a été parmi les premiers studios à permettre la distribution de films par satellite. Grâce son partenariat avec Pixar, il a été un des pionniers de l'animation. Sur Internet, Disney a ouvert Toontown, le premier monde virtuel en ligne pour les enfants. Et il expérimente de nouvelles façons de distribuer ses films numériquement. Valenti non plus n'est pas un technophobe. Il possède même un terminal avec disque dur pour enregistrer ses émissions de télé préférées. Mais il dit qu'il y a des limites à ce que le public devrait être capable de faire avec les films et les émissions de télévision. À cette fin, le MPAA travaille en collaboration avec une douzaine de sociétés technologiques, incluant Microsoft et IBM, ainsi que des scientifiques du MIT et de Caltech, « pour essayer de découvrir le genre de systèmes de sécurité que nous avons besoin d'installer sur nos films... La technologie est la cause du problème et la technologie en sera la solution. »
Lors de ses performances décousues sur le thème de « nous contre le reste du monde » devant le Congrès, Valenti se sert souvent de raccourcis rhétoriques simplistes, comme lorsqu'il relie le piratage au «terrorisme».(16) (Mon propre sénateur, Diane Feinstein, est devenu une partisane d'Hollywood dans ce conflit, considérant les réseaux de partage de fichiers comme un très gros risque pour la sécurité de la nation.) Valenti cherche aussi à stigmatiser tous les réseaux de travail peer-to-peer comme pourvoyeurs de piratage de pornographie. Ce n'est donc pas une surprise qu'il soit vilipendé dans de nombreux quartiers du cyberespace. Mais cela le dérange-t-il ?
« Je ne l'apprécie pas, mais je sais que ce que je fais est bien, affirme-t-il. Je crois aux changements. Le changement irrigue chaque entreprise, et plus particulièrement le milieu du cinéma. Donc je l'accueille, tout en prenant soin de m'assurer que le vol ne mettra pas en pièces le futur que nous créons. »

Sur un autre continent, Lawrence Lessig ouvre la porte de son bureau à l'université de Stanford. Derrière lui des piles de dossiers vacillent sur un bureau près du Macintosh qu'il a utilisé pour écrire « Code », « The Future of Ideas » et « Free Culture », trois livres qui traitent des menaces à l'encontre de la liberté de la créativité dans cet âge numérique. Cet immense géant de la loi cybernétiques porte un gilet bleu, une chemise jaune pâle au col déboutonné, et un jean noir. Des lunettes à monture métallique se perchent sur son visage compact. Tandis qu'il parle d'une voix douce et mesurée, on peut facilement imaginer une foule de caricaturistes se battant pour capter la taille et la majesté de son front étonnamment imposant pour une édition qui saurait piquer la conscience publique.
Ce jour-là, ce professeur de droit de 42 ans semble abattu, deux semaines après que la cour suprême des États-Unis s’est prononcée contre lui dans l'affaire Eldred versus Ashcroft, l'affaire la plus importante de sa carrière. Il s'était considérablement investi émotionnellement dans cette affaire concernant Éric Eldred, un programmeur informatique à la retraite, habitant le New Hampshire, qui avait créé un site Internet d'œuvres littéraires sélectionnées dans le domaine public (17). Ce site recevait 3000 visites par jour, d'étudiants du monde entier, cherchant à consulter la littérature de Nathaniel Hawthorne, Anthony Trollope, et bien d'autres. Eldred était très excité à l'idée de pouvoir ajouter les ouvrages publiés dans les années 20 : les histoires d'Ernest Hemingway, Ring Lardner, Virginia Woolf, Gatsby le Magnifique, Le Faucon maltais, des chansons de Gershwin et de Berlin, des livres du Dr Seuss, des poèmes de Robert Frost, et les premiers numéros du Times, du Reader's Digest et du New Yorker. Un nombre incalculable d'autres personnes ont des projets similaires pour publier ou reconstruire sur ces œuvres.
Cela peut vous surprendre, mais vous pouvez enfreindre la loi sur les d

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